Décider de se faire tester et dépister pour diverses maladies est une décision difficile. Pour plusieurs patients, le dépistage n’améliore pas l’état de santé et peut susciter – plutôt que soulager – l’anxiété. C’est certainement le cas du cancer de la prostate qui est le cancer non cutané le plus fréquent chez les hommes et la troisième cause de décès lié au cancer parmi les hommes au Canada (1). La bonne nouvelle est que le pronostic à long terme est encourageant : on estime que le taux de survie à 10 ans s’élève à 95 %, le meilleur parmi les cancers chez les hommes (2). La mauvaise nouvelle est que l’outil de dépistage fréquemment utilisé– le test de l’antigène prostatique spécifique (APS) – n’est pas très fiable.
Le test de l’APS est un test sanguin qui mesure la présence d’une protéine produite par les cellules de la prostate. Un taux élevé d’APS pourrait être un signal d’alerte du cancer, mais pas nécessairement. Les « faux-positifs » sont aussi fréquents. Un diagnostic de cancer de la prostate peut être effrayant et un grand nombre d’hommes meurent de la maladie, mais dans la plupart des cas le cancer de la prostate évolue lentement et les hommes vivent sans en ressentir les symptômes. Un résultat positif du test de l’APS peut provoquer beaucoup d’anxiété chez les hommes, particulièrement si le résultat est faux ou mène à la détection d’un cancer qui n’évoluerait jamais au point d’entraîner des problèmes de santé ou de causer la mort. Dans l’intervalle, les hommes dont le test décèle un taux élevé d’APS subissent en général des examens plus approfondis y compris une biopsie de la prostate, une intervention douloureuse qui peut entraîner une infection, du sang dans l’urine et une hospitalisation.
Ces problèmes ont amené les chercheurs à examiner de plus près les avantages et les inconvénients du test de l’APS. Une revue systématique de 2014, menée en partenariat avec le Groupe d’étude canadien sur les soins de santé préventifs, a examiné les résultats de trois essais cliniques aléatoires faisant appel à plus de 200 000 hommes (3). Plus récemment, un groupe d'experts américains, le US Preventive Services Task Force, a mené une revue systématique de trois essais cliniques aléatoires auxquels ont participé 600 000 hommes (4). Le but de ces revues systématiques était d’évaluer les bénéfices et les inconvénients du dépistage du cancer de la prostate à l’aide du test de l’APS (3, 4).
Ce que nous dit la recherche
Les avantages du dépistage de l’APS ne sont pas cohérents d'une étude à l'autre. Ce qui ressort particulièrement sont les inconvénients associés au dépistage, y compris de fortes chances de résultats faussement positifs, les dangers de complications suite aux biopsies de la prostate et le surdiagnostic (3, 4). Ces risques potentiels, comparés aux avantages, ont conduit le Groupe d'étude canadien sur les soins de santé préventifs à recommander que le test APS ne soit plus utilisé pour le dépistage du cancer, en particulier chez les hommes âgés de moins de 55 ans et de plus de 70 ans (3). On conseille aux hommes âgés de 55 à 69 ans, le groupe où le risque est le plus élevé, de solliciter l'avis d'experts et de s'informer au sujet des autres options avant de décider de passer un test de l'APS (3).
Il est important de noter que la recommandation du Groupe d’étude n'est pas universellement acceptée. Par exemple la position de Cancer de la prostate Canada est que les avantages du dépistage de l'APS l'emportent sur les inconvénients et que l'élimination du test se traduirait par une augmentation significative de la mortalité par cancer de la prostate (5).
Alors qu'est-ce qu'un gars doit faire ? Comme toujours, et en particulier dans ce cas, les hommes sont invités à consulter leur médecin afin de comprendre pleinement les avantages et les inconvénients du test de l'APS. Votre médecin vous aidera à choisir le meilleur plan d'action en fonction de votre situation personnelle (y compris l'appartenance ethnique, les antécédents familiaux de la maladie et d'autres facteurs de risque) et vos préférences personnelles. Des aides à la décision sous forme de brèves brochures sont également disponibles pour vous aider à faire des choix éclairés sur des questions difficiles telles que le dépistage du cancer de la prostate (6).
Tout le monde est d'accord sur une chose : de nouveaux outils de dépistage, plus précis et plus efficaces sont nécessaires de toute urgence pour détecter et traiter le cancer de la prostate en toute sécurité.
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