Lorsque nous pensons aux problèmes urgents de santé publique, notre esprit se porte souvent sur des sujets tels que les maladies infectieuses, le tabagisme, l’obésité et les maladies cardiaques. Les chutes, bien qu’elles ne soient pas un sujet de plaisanterie, ne font probablement pas partie de nos préoccupations. Pourtant, les chutes sont considérées comme un problème majeur dans le monde entier, contribuant à plus de 680 000 décès par an dus à des blessures involontaires, juste derrière les accidents de la route. En outre, plus de 37 millions de chutes non mortelles nécessitent des soins médicaux chaque année, certaines entraînant un handicap, voire la nécessité d’une hospitalisation ou d’une admission dans un établissement de soins de longue durée (1).
L’âge, les maladies sous-jacentes, les troubles cognitifs et les effets secondaires des médicaments sont autant de facteurs qui augmentent le risque de chute (1). Les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer et d’autres types de démence présentent plusieurs de ces caractéristiques. Ces troubles neurocognitifs se traduisent par une déficience cognitive légère à sévère, c’est-à-dire de troubles de la mémoire, de la pensée, de la prise de décision et du langage.
Pour prévenir ou ralentir l’aggravation des troubles cognitifs, les médicaments connus sous le nom d’inhibiteurs de la cholinestérase — tels que le donépézil [Aricept®], la rivastigmine [Exelon®, Prometax®] et la galantamine [Razadyne®, Reminyl®] — sont largement accessibles et couramment utilisés (2). Cela dit, les inquiétudes concernant le fait qu’ils constituent un facteur de risque de chute persistent, car les résultats des recherches manquent de cohérence (2-5). Pour clarifier davantage la sécurité de ces médicaments, une revue systématique récente a examiné l’effet des inhibiteurs de la cholinestérase sur le risque de chute, d’évanouissement ou de blessure accidentelle chez les adultes atteints de troubles cognitifs, par rapport à un placebo (2).
Ce que la recherche nous apprend
Il semble que les inhibiteurs de la cholinestérase puissent réduire le risque de chute. En chiffres, cela signifie que dans un groupe de 1000 personnes, environ 10 personnes de moins tombent. Toutefois, ce résultat positif doit être interprété avec prudence, car si on limite l’analyse aux études de meilleure qualité, l’effet sur les chutes disparaît. Deuxièmement, l’utilisation de ces médicaments peut augmenter le risque d’évanouissement. Pour en revenir aux chiffres, cela signifie que dans un groupe de 1000 personnes, quatre personnes de plus s’évanouissent. Enfin, en ce qui concerne le risque de fractures ou de blessures accidentelles, nous ne constatons aucun effet dans un sens ou dans l’autre, c’est-à-dire aucune augmentation ou diminution du risque (2).
En fin de compte, c’est à la personne concernée, à ses aidants et aidantes et à son équipe soignante qu’il appartient de décider si un médicament donné convient à une personne atteinte de troubles cognitifs. En effet, les risques et les bénéfices de l’utilisation du médicament doivent être pondérés en fonction de chaque personne et de sa situation. Les résultats de cette revue peuvent contribuer à ce processus d’évaluation.