L’épidémie du VIH (virus de l’immunodéficience humaine) a fait irruption dans nos vies il y a des décennies, suscitant une grande attention médiatique et une mobilisation mondiale. Qui ne se souvient pas des campagnes publicitaires liées au VIH-SIDA ou des films Philadelphia, Dallas Buyer Club et Bohemian Rhapsody ? Si les progrès médicaux ont permis aux personnes atteintes du VIH de mener une vie presque normale, il n’en reste pas moins que l’épidémie est encore bien réelle.
Plus de 39 millions de personnes sont atteintes du VIH dans le monde. À la fin de 2020, on estimait qu’environ 63 000 Canadiens vivaient avec ce virus, diagnostiqués ou non.(1) Le VIH se transmet par les fluides corporels d’une personne infectée (sang, lait maternel, sperme et sécrétions vaginales). Aujourd’hui, les facteurs de risque les plus fréquents sont les rapports sexuels entre hommes, les rapports sexuels entre hommes et femmes, la consommation de drogues injectables et les transfusions sanguines.
Grâce aux progrès médicaux continus en matière de médicaments, le VIH peut désormais être considéré comme une maladie chronique. Aujourd’hui, la plupart des gens ne meurent pas du virus. C’est donc dire que de plus en plus de médecins spécialisés en gériatrie (c’est-à-dire la médecine qui touche à la prévention, aux diagnostics, aux thérapies et aux aspects sociaux des maladies chez les personnes âgées) sont appelés à prodiguer des soins à des personnes atteintes du VIH.
La médecine VIH-gériatrique se veut un travail collaboratif entre spécialistes du VIH et gériatres. Il s’agit d’une discipline assez jeune qui a pour objectif d'assurer une approche globale et spécifique des patients âgés atteints du VIH, centrée sur la fonction et le continuum de soins.(2) Comment les gériatres envisagent la prise en charge des personnes âgées vivant avec le VIH ?
Ce que la recherche nous apprend
Une récente synthèse des données probantes a recensé six études sur la perspective des gériatres concernant les soins offerts aux personnes âgées vivant avec le VIH. Les gériatres interrogés étaient majoritairement des femmes hétérosexuelles ayant une dizaine d’années d’expérience.
Six thèmes ont été mis de l’avant :
1. Connaissance générale du VIH
Les résultats à des questionnaires auto-administrés sur le VIH montrent que les gériatres comprennent assez bien la maladie.
2. Attitude à l’égard des personnes vivant avec le VIH
Dans l’ensemble, les gériatres ont des attitudes positives à l’égard des personnes âgées vivant avec le VIH et sont ouverts à leur prodiguer des soins.
3. Expérience dans la prise en charge de personnes vivant avec le VIH
Les études dévoilent que les gériatres traitent très peu de patients atteints du VIH (entre 0 et 5 patients par année), ce qui fait qu’ils manquent d’expérience envers ce segment de leur clientèle.
4. Connaissances spécifiques liées aux personnes âgées vivant avec le VIH
La prise en charge du VIH chez les personnes âgées est un défi pour les gériatres, car s’ils sont les spécialistes des personnes âgées et des maladies qui les touchent, ils ne possèdent pas nécessairement les connaissances pointues liées au VIH et la façon dont il affecte les personnes âgées. Les études révèlent que moins de la moitié des gériatres pouvaient classer correctement les facteurs de risque d’infection par le VIH chez les personnes âgées, et que seulement le tiers savait que la démence liée au VIH peut être réversible ou ralenti avec un diagnostic et un traitement appropriés. S’ils veulent soigner cette clientèle adéquatement, ils devront prendre en compte les comorbidités courantes associées au vieillissement, comme les problèmes cardiaques, le diabète et les maladies neurodégénératives, tout en gérant le VIH. Ce qui est embêtant, c’est que les premiers signes du VIH ressemblent à des maux liés au vieillissement, et que les médicaments pour contrôler le VIH peuvent entrer en interaction avec d’autres médicaments que prennent les personnes âgées.
5. Connaissances liées au dépistage du VIH chez les personnes âgées
Les gériatres interrogés ont déclaré faire peu de dépistage du VIH, car ils craignent d’offenser ou de gêner leurs patients âgés en proposant un test de dépistage ou en parlant de sexualité. En raison du nombre croissant de nouveaux diagnostics de VIH chez les personnes âgées,(4) pour réduire la stigmatisation et identifier les personnes non diagnostiquées, un dépistage systématique annuel pour tous les patients, quel que soit le risque, devrait être effectué.
6. Expérience dans la prise en charge de personnes âgées LGBTQ +
Bien que l’attitude de la plupart des gériatres soit positive, il n’en reste pas moins qu’il existe des préjugés tenaces envers les membres de la communauté LGBTQ+ : près de 40 % des gériatres interrogés ont déclaré avoir été témoins de discrimination envers les patients, les familles ou le personnel LGBTQ+ sur leur lieu de travail. Une étude réalisée en 2010 révèle que plus de la moitié des lesbiennes, gais et bisexuels et 70 % des personnes transgenres ont été victimes de discrimination de la part de prestataires de soins de santé (préjugés, suppositions erronées, déclarations désobligeantes ou refus de soins).
Le VIH peut affecter les gens de tous âges
Il est important de se faire dépister et traiter le plus tôt possible, car les antirétroviraux permettent de supprimer la charge virale dans le sang et d’empêcher la transmission du virus. Informez-vous et parlez-en avec votre professionnel de la santé.
Par ailleurs, diagnostic ou pas, n’oubliez pas que le VIH ne se transmet pas par les baisers, les câlins ou le partage de nourriture : n’hésitez donc pas à démontrer votre affection à votre proche qui vit avec le VIH!