L’une de nos préoccupations lorsque nos proches vieillissent est leur bien-être et leur sécurité. C’est d’autant plus vrai lorsqu’ils sont hébergés dans des résidences ou des centres d’hébergement et de soins de longue durée. Les résidents de ces établissements constituent une population particulièrement vulnérable aux abus et à la maltraitance compte tenu de leur perte d’autonomie, de la diminution de leurs capacités physiques et cognitives, et du fait qu’ils vivent à proximité de nombreux étrangers (que ce soit d’autres résidents, des employés et des visiteurs).
Les agressions sexuelles font partie des formes d’abus les plus odieuses qui soient, et des aînés vivant en établissements en sont parfois victimes. Il s’agit d’une réalité encore peu connue. Les agressions sexuelles sont rarement rapportées par les victimes. Elles sont peu ou pas documentées par les établissements et les autorités : les rapports font généralement état d’abus et de maltraitance de façon générale sans identifier clairement les agressions sexuelles. De plus, les professionnels et les établissements semblent mal formés et outillés afin de faire face à de tels problèmes.(1)
Qu’est-ce que la recherche peut nous apprendre afin de faire la lumière sur ce problème?
Ce que la recherche nous apprend
Une récente revue systématique de 15 études a examiné le profil des victimes d’agressions sexuelles et le profil des agresseurs, ainsi que les caractéristiques médico-légales des agressions sexuelles survenant dans des établissements.(2)
Selon les études recensées, l’agression sexuelle était le type d'agression le moins souvent observé, soupçonné et signalé par rapport aux autres formes d'agressions étudiées. Les victimes d’agressions sexuelles étaient plus susceptibles d’être des femmes handicapées qui recevaient une aide financière pour vivre dans l’établissement. Quant aux agresseurs, ils étaient plus susceptibles d'être des résidents ou des membres du personnel de sexe masculin ayant des antécédents criminels. Les agressions ont généralement lieu le soir, lorsque le personnel est moins nombreux.
La revue souligne également qu’il est difficile d’intervenir. Même si l’on soupçonne qu’une agression ait eu lieu, il peut être complexe d’obtenir des informations de la part d’une victime potentielle dont l’état de santé et les capacités cognitives sont altérées. La notion de consentement est également difficile à évaluer auprès de telles victimes. De plus, les stéréotypes sexuels négatifs qui prédominent à l’égard des personnes âgées et de la sexualité, la dépendance accrue des résidents envers les autres, ou encore la solidarité des membres du personnel sont des obstacles qui font obstacles à la déclaration, la détection et la prévention des agressions sexuelles.
Les études mettent également en lumière le manque de formation du personnel des établissements de soins afin de faire face aux agressions sexuelles. Parfois, les signes de violences sexuelles n'étaient pas systématiquement documentés et les preuves étaient détruites accidentellement (par exemple, suite au lavage des draps et de l’entretien des chambres des résidents). Le prélèvement de substances biologiques laissées par les agresseurs est d’autant plus ardu que plusieurs établissements ne possèdent pas d’outils adéquats (comme des trousses médico-légales) ni de protocoles d’interventions établis.
Non seulement ces obstacles signifient que les agresseurs ne feront pas face à la justice, mais cela signifie également que bien des victimes ne recevront pas les soins dont elles ont besoin. En effets, les femmes agressées sexuellement souffrent de 50% à 70% plus de problèmes gynécologiques, de problèmes du système nerveux central et de problèmes liés au stress. Une étude a même révélé que plus de 50% des victimes sont décédées dans l'année suivant leur agression.
Reconnaître les signes et agir
Il va de soi qu’il est important de visiter et de prendre des nouvelles de vos proches vivant en établissements sur une base régulière. Restez à l’affût des signes de violences physiques et sexuelles, notamment :
- dépression inexpliquée, peur ou paranoïa;
- inconfort ou anxiété en présence de certaines personnes;
- marques visibles, ecchymoses, entailles, enflures ou brûlures inexpliquées;
- vêtements déchirés, souillés ou couverts de sang;
- maladies transmissibles sexuellement et autres infections inexpliquées; et
- explications vagues ou illogiques concernant les blessures (que ces explications soient fournies par vos proches ou par le personnel de l'établissement).(3)
Si vous voyez quelque chose d’anormal, dites-le.(4)